Les écrans font partie intégrante du quotidien des enfants… et ils ne se limitent plus à l’écran de télévision uniquement dans le salon familial ! Tablettes, smartphones et autres objets connectés, ils se glissent parfois jusque sur le poignet de papa ou maman ! Dans un monde ultra-connecté, trouver le bouton Off semble plus facile à dire qu’à faire. Face à ce constat, les spécialistes de l’enfance invitent à la vigilance et rappellent l’importance d’adapter les temps d’écrans en fonction de l’âge de l’enfant. Mais alors, concrètement, combien de temps d’écran accorder à son enfant ? Et à partir de quel âge ? Voici quelques repères par tranche d’âge et des conseils pratiques pour mettre en place une routine saine de gestion de temps d’écran qui n’entrave pas le développement psychomoteur de votre enfant.
Pourquoi faut-il impérativement limiter le temps d’écran chez les enfants ?
Apprendre, bouger, interagir… tout ce que les écrans peuvent freiner
Une surexposition aux écrans (particulièrement avant 3 ans), a des effets néfastes sur le développement cognitif, moteur et la santé de l’enfant. Les conséquences, avancées par tous les professionnels de santé, sont nombreuses et ne doivent pas être prises à la légère :
- Troubles du sommeil ;
- Difficultés d’attention et de concentration ;
- Retard dans l’acquisition et le développement du langage ;
- Risque d’isolement et frein potentiel dans le développement des aptitudes sociales ;
- Impact sur la santé physique : difficultés en motricité globale, surpoids voire obésité. Dans une étude, l’INSERM démontre que les enfants exposés de manière prolongée aux écrans dès l’âge de 2 ans auront un taux de masse corporelle supérieure à la moyenne dès 5 ans.
Même conclusion pour l’exposition passive aux écrans et les contenus « éducatifs » ?
On entend souvent dire que les contenus numériques « éducatifs » peuvent aider au développement des jeunes enfants. Pourtant, dans la très petite enfance (avant 3 ans), ces contenus — même bien intentionnés — ne remplacent en rien les apprentissages fondamentaux qui passent par l’exploration avec les 5 sens : manipuler, toucher, écouter, observer, interagir, tester et recommencer encore et encore jusqu’à réussir l’étape avec brio.
Autre point souvent minimisé : les écrans dits « passifs ». Par exemple, une télévision allumée en fond sonore, même si l’enfant ne la regarde pas directement, celle-ci capte malgré tout son attention de manière inconsciente. Le cerveau du très jeune enfant, encore en plein développement, est sollicité par les images et les sons, au détriment de tout ce qui peut se passer dans son environnement : une odeur de gâteau dans la cuisine, le chant des oiseaux dehors… Bref, tout ce qui peut éveiller sa curiosité, l’encourager à explorer son environnement et nourrir son éveil moteur et affectif. L’exposition passive place l’enfant dans un statut de spectateur et non d’acteur de son développement.
Loin des écrans, quels sont les besoins à couvrir en priorité chez l’enfant ?
Pour s’épanouir comme une fleur et s’ouvrir au monde qui l’entoure, un enfant a besoin d’être nourri avec les ingrédients suivants :
- Jouer de 1000 et une façons : puzzles, jeux de construction, formes à visser… ;
- Échanger et coopérer avec les autres : apprendre à partager, à écouter, à s’exprimer ;
- Coordonner ses mouvements, bouger, courir, sauter et prendre conscience de son corps dans l’espace ;
- Imaginer des scénarios de jeux, imiter des scènes du quotidien ;
- Jouer librement sans consignes précises pour laisser place à la créativité et au jeu spontané ;
- Et souvent… s’ennuyer ! Ne rien faire, rêver et apprécier le moment présent se savoure dès petit. C’est aussi comme ça que naissent l’imagination et la curiosité.
En résumé, un écran c’est plutôt froid et distant… Rien de comparable avec l’émotion d’un regard échangé ou la chaleur d’une voix lors d’un moment partagé. Les écrans ne remplacent aucun des besoins cités ci-dessus et n’apportent rien de significatif avant 5 ans. Au contraire, ils forment une barrière invisible entre l’enfant et le monde qui l’entoure.
Voilà pourquoi poser des limites sur le temps d’écran ne fera pas de vous un parent trop strict et ringard. Au contraire, c’est une belle preuve d’amour et de protection que de proposer à son enfant un environnement adapté pour grandir à son rythme avec les deux pieds bien ancrés dans le réel. Les écrans peuvent avoir une petite place, mais ils ne doivent jamais prendre celle du jeu libre, des câlins, des histoires, des petits bonheurs simples du quotidien…
Gestion du temps d’écran pour l’enfant : quelles sont les recommandations en fonction de l’âge ?
La méthode du 3-6-9-12
Instaurée par le psychiatre Serge Tisseron, cette méthode préconise un usage des écrans qui va crescendo en fonction de l’âge des enfants :
Avant 3 ans
Zéro écran ! Éteignez la télévision quand votre bébé est dans la pièce et limitez au maximum l’usage de votre smartphone si votre bébé est à proximité.
De 3 à 6 ans
À cet âge, l’usage des écrans doit rester très limité : maximum 20 minutes par jour et pas forcément tous les jours. Restez près de votre enfant lors de son temps d’écran pour vous assurer que le contenu est toujours adapté. Enfin, Serge Tisseron recommande de ne pas avoir de console de jeu personnelle avant 6 ans.
De 6 à 9 ans
De 30 min à 1h max d’écran par jour (et encore une fois pas tous les jours). L’enfant ne doit pas encore avoir accès à Internet et surtout pas en autonomie. L’accès à Internet expose l’enfant à bien plus que des contenus inadaptés. Avant 8 ans, il construit encore des repères essentiels comme la différence entre espace intime et espace public. Sans cette compréhension, il lui est difficile de savoir ce qu’il peut montrer ou partager en ligne. De plus, l’enfant n’a pas encore pleinement intégré la notion de point de vue, c’est-à-dire le fait que chacun peut avoir une opinion différente sur un même sujet. Ces deux repères sont pourtant essentiels pour évoluer plus tard en toute sécurité sur Internet avec recul et discernement.
De 9 à 12 ans
Le temps d’écran peut s’allonger mais ne doit pas dépasser 1h30-2h par jour. L’enfant peut naviguer sur internet seul ou accompagné par un adulte (option fortement recommandée). Ne faites pas 100% confiance au contrôle parental et ne vous contentez pas seulement d’interdire certains contenus. Il est essentiel d’accompagner l’enfant avec des explications adaptées, pour qu’il comprenne lui-même pourquoi il doit se protéger de certaines images ou informations ou interactions avec des inconnus qui se feraient passer pour des enfants du même âge. Mieux vaut éviter de lui dire simplement que « c’est pour les grands » ou que « tu es trop petit ». Ces phrases peuvent avoir l’effet inverse et le pousser, par envie de prouver qu’il grandit, à aller voir ce qui lui est interdit. En lui donnant des explications claires, on l’aide à se responsabiliser et à mieux comprendre les limites posées.
Après 12 ans
Votre enfant franchit la porte de l’adolescence. Il devient plus autonome et pourra bénéficier d’un temps d’écran plus long et quotidien. Restez à son écoute pour échanger avec lui si besoin sur les contenus qu’il consulte. Enfin, interdisez l’accès aux réseaux sociaux avant 15 ans.
5 signes qui doivent vous alerter sur l’usage des écrans chez votre enfant
Ces recommandations en fonction de l’âge sont bien évidemment à adapter à l’enfant. Tous les enfants n’ont pas la même sensibilité aux images ni la même maturité pour comprendre et discerner le vrai du faux. Pour certains, regarder un film d’animation est inenvisageable à 6 ans même si la signalétique de l’ARCOM indique « Tous publics ». Voici 5 signes sur le comportement de votre enfant qui doivent vous questionner sur son usage et son rapport aux écrans :
- Il a besoin d’un écran le soir pour s’endormir ;
- Ses apprentissages ralentissent et ses résultats scolaires sont en chute ;
- Il préfère l’univers virtuel aux vraies interactions avec la famille ou les amis ;
- Il se désintéresse de ses activités extrascolaires (notamment sportives) ;
- Il se renferme sur lui-même et n’exprime pas ce qui ne va pas.
Nos astuces pour éviter que les écrans ne prennent toute la place à la maison
Gérer les écrans est un défi du quotidien pour les parents. Alors pour éviter d’entrer chaque jour dans une négociation infernale (les enfants sont de fins négociateurs, à bon entendeur 😉), voici une liste de conseils abordables et concrets pour reprendre la main sur la gestion des temps d’écran à la maison.
Suivez la règle des « 4 pas » de Sabine Duflo
Retenez ces limites simples pour préserver le sommeil, la concentration et les moments privilégiés en famille :
- Pas d’écran dans la chambre de l’enfant (ni console, ni télévision, ni tablette ou smartphone) ;
- Pas d’écran le matin avant de partir à la crèche ou à l’école ;
- Pas d’écran pendant les repas (pas de télévision allumée pour le fond sonore) ;
- Pas d’écran avant de se coucher (la lumière bleue des écrans retarde la production de mélatonine et donc l’endormissement).
Établissez des temps d’écran bien précis
Fixez des temps et tenez-vous-y, il en va de votre crédibilité 😉 Même si frustration et colère apparaissent, vous rendez service à votre enfant sur le long terme. Souvent, quand les règles sont claires, annoncées en amont et respectées, les enfants sont plus enclins à les accepter. Par exemple, plutôt qu’un minuteur qui coupe en plein milieu d’une vidéo, vous pouvez donner la consigne suivante : « Tu peux regarder deux épisodes. Quand le générique du second est terminé, ce sera fini et tu pourras choisir une autre activité que tu aimes. »
Proposez des alternatives valorisantes aux écrans et laissez votre enfant s’ennuyer !
Plus votre enfant est investi dans des activités qui lui plaisent, plus les écrans perdront de leur attrait : jeux de société, dessin, lecture, balades en extérieur, moments créatifs… Laissez-le aussi explorer le jeu libre, sans consignes, simplement porté par ses envies. Et si, parfois, il a juste envie de rêvasser sur le canapé ou de s’allonger dans sa chambre, laissez-le faire… Ce temps de pause n’est pas du « vide », bien au contraire : il nourrit son imagination, l’aide à se recentrer et lui permet d’apprivoiser ses émotions.
Ne surcotez pas les écrans
Les écrans ne doivent pas être LA récompense ultime. Sinon, ils deviennent vite aussi addictifs que les bonbons !
Retardez au maximum l’achat d’un smartphone, d’une console de jeux…
Autant que possible, retardez l’achat d’un écran personnel pour votre enfant. Plus vous repoussez ce moment, plus vous lui offrez du temps pour grandir loin des sollicitations numériques (il a tout le temps de s’y confronter, rien ne sert de s’y précipiter dans la petite enfance). Bien sûr, certaines situations peuvent justifier un premier équipement, notamment lorsque l’enfant rentre seul de l’école ou reste seul à la maison en attendant le retour des parents. Dans ce cas, privilégiez un moyen de communication simple, sans accès à Internet ni aux réseaux sociaux. Il existe aujourd’hui des alternatives aux téléphones portables old school (vous savez… ceux à touches) : The Phone, un smartphone au look moderne mais conçu uniquement pour les appels et les SMS (et cocorico, il s’agit d’une marque française !).
Même principe pour les consoles de jeu : préférez l’option « console familiale », partagée entre tous les membres du foyer, plutôt que « ta console à toi ». Cette petite nuance évite que l’objet devienne un symbole de possession ou de pouvoir, et renforce l’idée que les écrans s’utilisent dans un cadre collectif, avec des règles communes.
Montrez l’exemple, tout simplement !
Rangez votre téléphone en rentrant à la maison après le travail, coupez les notifications non indispensables pour être pleinement disponibles le temps du tunnel du soir. Vos enfants apprennent en observant… Et une fois qu’ils seront couchés, vous aurez tout le temps de jeter un œil à vos multiples notifications.
Côté parents : gérer les écarts sans (trop) culpabiliser
La sensibilisation est mère de toutes les vertus
Les recommandations officielles sont essentielles car elles donnent un cadre et des repères aux parents sur les bonnes pratiques à respecter en matière de gestion des temps d’écran pour leurs enfants. Compte tenu de la place de plus en plus importante que prennent les écrans dans les foyers, il est du devoir des parents d’accompagner leurs enfants en fonction de l’âge pour les protéger, les guider et les aider à bien grandir en connaissance de cause dans la société numérique.
L’exception et l’imprévu font partie du jeu !
Les journées de pluie, les petits rhumes, les longs trajets… font partie de la VRAIE vie et sont le lot de tous les parents (même ceux qui veulent vous faire croire le contraire sur les réseaux sociaux). Dans ces moments-là, certains arbitrages sont parfois nécessaires et c’est normal ! Comme pour tous les sujets liés à l’éducation des enfants, chaque parent peut ponctuellement adapter les règles en matière de gestion des écrans. D’ailleurs, ce qui est « facilement » applicable au premier enfant ne l’est plus toujours au second enfant et encore moins au troisième… La parentalité n’est pas linéaire, elle évolue au fur et à mesure que les enfants grandissent et que le foyer se développe. Alors, soyez indulgent avec vous-même et faites taire cette petite voix nommée « culpabilité » qui se pose régulièrement sur votre épaule de parent. Ce qui compte, c’est de fixer des règles et de s’y tenir sur la durée : peu de risque qu’un écart de temps en temps vienne perturber l’équilibre familial en matière de gestion des temps d’écran, surtout si les bonnes habitudes reprennent le dessus au quotidien.
En bref
- Il ne s’agit pas de diaboliser les écrans mais plutôt d’éduquer le duo parent-enfant à un usage sain et adapté en fonction de leur âge.
- Pour leur développement global et leur bien-être, les enfants doivent avoir un temps d’écran très limité et toujours sous la supervision d’un adulte.
- Il y aura des jours « avec » et des jours « sans », soyez indulgents et visez la régularité sur le long terme.
Vous êtes parents ? Partagez-nous vos tips ou bonnes pratiques qui ont fait leur preuve dans la gestion des temps d’écran avec vos enfants. Les astuces des uns et des autres peuvent inspirer notre communauté de parents 🙂
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